Variations sur Martial

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Déclaration du droit de l’homme : chacun a droit aux moyens de l’apaisement des échanges pour faire son intelligence. Dans cette optique, Beta-Oblique présente un livre.

Etienne Wolff présente un recueil de traductions plus ou moins fidèles aux mots de Martial, l’auteur piquant de la Rome impériale. Ce travail est passionnant pour nombre de raisons.

Il l’est pour remettre en évidence l’inspiration qu’offrent les mêmes mots à des oreilles diverses, qu’elles se situent dans des espaces ou des temps différents : ce croisement fait source au point d’un crâne. De celui-ci, tel écho émane des mots, qui ne sera pas celui d’un autre. Evidence ? Certes. Mais cette évidence nous donne prétexte à rappeler qu’il convient de se défier de tout ce qui est acquis ou semble l’être, tant le génie provient de la simple capacité à reconsidérer ce qui est quotidiennement sous nos yeux ; ce qui ne se voit précisément plus parce que, pourrait-on dire, la chose fait consensus. En matière de traduction ce consensus est bien sûr illusoire. Tel effet recherché implique telle déformation ; tel autre le recours à un autre vocabulaire, une autre géométrie grammaticale.

Si l’aéronautique moderne a imposé pour ses besoins le terme de géométrie variable, pourquoi ne pas penser sérieusement à une physique linguistique ? Et d’abord à la poétique, non comme un art oiseux, mais au contraire opérationnel qui peut tour à tour obscurcir, élargir, fendre ou fondre un même sujet. Cette idée n’est pas nouvelle ; elle est même couramment employée à dessein. Mais l’occasion nous est donnée ici de mieux en prendre conscience, de mesurer les différences de potentiel sous leurs divers rapports, de voir, enfin, la nature réelle des langages.

Une langue est en effet si naturelle que sa nature même, — seconde nature, passe inaperçue. N’est-il pas stupéfiant de pouvoir exprimer une idée sans même songer un seul instant aux mots à employer ? Et plus encore : à rarement avoir à penser, à préméditer une réponse. Comme si l’idée nous précédait. Comme si nous n’avions qu’à la suivre, sans même sentir sa présence et cependant nous élançant dans l’expression avec une déconcertante assurance. Il n’y a que les poètes à se torturer sur les mots. Pourquoi ? Parce que, probablement, ils savent le pouvoir de la forme. La plasticité de leur forme verbale est assimilable à la prouesse technologique de l’avionneur capable de reconformer un aéronef comme l’oiseau de haut vol use de lenteur ou de vitesse à dessein. Verbaliser est pour chacun une seconde nature ; mais voleter ne fait pas l’oiseau de proie.

Le professeur Wolff livre donc un document dont chacun pourra tirer profit, quel que soit l’angle de vue constitué par notre origine. Tel exemple l’a inspiré ; toutes les facettes qu’il offre sont ainsi des sources qui se répondent dans une unité de questionnement, fondamentale. Que l’Idée prenne le Lecteur à sa suite. Avec toute notre gratitude.